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la chronique littéraire de Victor Bérenguier

                       CHRONIQUE N° 110: L'ÉCHO DE LA NOTE BLEUE 

l'écho de la note bleue

 L'ÉCHO de la note  BLEUE est  dédié à la musique, et pour cause; l'auteure, Christine Baron, est passionnée de musique: dès l'âge de cinq ans, elle a commencé à "titiller" les touches de son piano. Comme pour tous les prodiges, cette passion ne l'a pas quittée et ce roman atteste de l'importance qu'elle accorde aux musiciens qui ont  bercé son enfance à l'époque où elle déchiffrait leurs partitions. Elle a « grandi avec ceux qui nous ont laissé le chant de leur âme » - non seulement Franz Liszt pour lequel, Pierre,  le personnage principal du roman semble avoir une préférence, mais aussi  tous les autres qu'elle nous fera découvrir au fil des pages: Chopin, Beethoven, Schubert, Wagner, Toscanini Berlioz, Paganini… En exergue de chaque chapitre, l'une  de leurs citations est destinée à focaliser notre attention et  à susciter notre intérêt  comme celle de Berlioz  que nous utiliserons dans notre propos. 

 

Avec Pierre, pianiste puis chef d'orchestre et tous les personnages qui gravitent dans son sillage, l'auteure  nous entraîne, à défaut de comédie musicale,  dans ce qu'on pourrait appeler une comédie humaine où tous les acteurs vouent à la musique, - cette musique qui bien plus qu'un langage universel est aussi le chant de l'âme des musiciens auteurs compositeurs -, la même passion que leur chef, sauf un: un certain Monsieur Charles, « un directeur de conservatoire plus soucieux de rentabilité que d'art ». Mais ce qui tient le lecteur en haleine c'est d'appréhender à travers  leur vécu, la personnalité, les émotions et "les aventures" de chacun de ces personnages:

 Padre,  père de Pierre,  « mélomane récalcitrant face à la vocation de son fils, mais pourquoi? » forcera son fils à faire des études de droit, lui donnant le sentiment d'une enfance violée, tandis que sa sœur, personnalité plus malléable  ne s'opposant pas aux desiderata de Padre qui a décidé qu'elle serait chirurgien, n'éprouve pas le même ressentiment; Piétro, le premier violon, surnommé Paganini;  Frédéric le soliste; Charlotte et Martin les jeunes espoirs; Jean- François le "frondeur";  mais aussi, « cette virtuose qui surgit si tard» dans la vie de Pierre, qui est elle? , et enfin Arielle, cette « femme avec qui il aimerait partager l'azur de George Sand » et à qui il confiera: « la musique ne commande rien, n'explique rien, ne dicte rien. A chacun de faire appel à sa propre émotivité, son imagination, ses sensations, pour essayer de peindre sa vie avec ses propres couleurs.»

 

Ce roman « est  aussi l'histoire de l'amour, l'amour qui s'invite quand on ne l'attend pas et repart de même » .

Cet amour, Pierre va enfin, à quarante ans, le découvrir à la Havane, au cours d'une visite dans une manufacture de tabac:

 

 « Une femme s'approcha de moi:

-          Normalement, cela ne dure pas trop longtemps.

-          Mais j'ai tout mon temps.

-          Vous n'êtes pas pressé de partir?

-          Non, j'arrive.

Elle s'étonna. Habituellement l'achat des cigares était la dernière étape du périple touristique, juste avant de reprendre l'avion:

-          Et vous? Vous partez? Questionnai-je.

-          Non, je suis en milieu de séjour. Je viens ici chaque année.

-          Seule?

La question avait échappé à mon contrôle. Ma maladresse me surprit.

-          Au moins, vous êtes direct.

-          Excusez-moi, ce n'est pas ce que je voulais vous demander.

-                        Mais c'est exactement ce que vous vouliez savoir. En sortant, nous irons boire un daiquiri au Floridita. Vous connaissez?

-          De réputation.

Je pris cette invitation pour une réponse à sa solitude […]

     À ce moment de la rencontre je me demandai si je devais accepter»

 

    Mais il accepta l'invitation d'Arielle et ils ne se quittèrent plus jusqu'à son départ. Elle utilisa la Chevrolet rose des hôtes qui l'hébergeaient pour lui servir de guide et ils apprirent à se connaître. Mais le destin est souvent capricieux et se  plaît à  déjouer vos plans:

 

«  Comme elle l'avait promis, elle m'accompagna jusqu'à l'aéroport. En roulant à trente kilomètres /heure elle avait triplé le temps du trajet. Nous nous taisions, à l'unisson dans notre silence.

-   Elle va me manquer cette Chevrolet rose dis-je enfin en voyant s'approcher les bâtiments de l'Aérogare.

-          Moi, ce n'est pas la Chevrolet qui va me manquer.

     Elle s'arrêta à quelque mètres de la porte d'embarquement et ne voulut pas descendre.

-          Arielle, sous une forme plus maladroite, je vous dis la même chose.

      Je prie sa main et la refermai sur le bristol de l'hôtel. J'avais écrit mon prénom et mon numéro de téléphone à Paris. Pas le temps de lui dire que j'étais souvent en voyage, ni pourquoi. Je faisais confiance au destin:

-          Je voudrais…

-    Non, surtout ne dites rien s'empressa-t-elle d'interrompre:

-          Je suis mariée.

L'Etat civil que je n'attendais pas.

[…]

« Laquelle des deux puissances peut-elle élever l'homme aux plus sublimes hauteurs, l'amour ou la musique? Il me semble qu'on devrait dire ceci: l'amour ne peut pas  donner une idée de la musique, la musique peut en donner une de l'amour. Ne les séparons pas, ce sont les deux ailes de l'âme.»

                                                                        Hector Berlioz,

                                                                        Compositeur

[…]

 

« -  Voilà c'est dit!

      Pour Arielle le soulagement, pour moi la déception et pour les deux l'inquiétude. Le regard brouillé et les mains moites elle esquissa son décor familial: un mari David, deux enfants, le retour prochain dans le midi de la France et une plaidoirie qu'elle n'avait pas préparée.

   David aimant, patient, bienveillant. De son agaçante compréhension naissait une obligation de fidélité. Elle m'expliqua qu'elle mettait toute sa bonne volonté pour être désagréable… Mais cette tactique ne faisait pas ses preuves: « David explique, excuse, le sourire attendri, le geste caressant. Les évidences ne sont pas les mêmes pour celui qui aime et celui qui n'aime plus.» me confia-t-elle des trémolos dans la voix. »

 

 Dès son retour en France, Pierre va n'avoir de cesse  de retrouver Arielle  et d'espérer pour cela en sa bonne étoile… qui ne tardera pas à répondre à son désir:

 

 

«  Paris! Enfin ou hélas?

    Pour la première fois, un contrat me  retenait dans une même ville pour trois mois. C'est de cette période qu'est née l'envie de me fixer. Une envie concrétisée cinq ans plus tard.

    J'avais un domicile fixe et je ne pouvais m'empêcher de penser que nous nous reverrions, elle et moi. Il paraît que le destin articule bien le hasard, j'avais envie de lui faire confiance. Sans doute laisserait-elle se reposer la rencontre  mais c'est à elle que revenait le choix de la relancer ou de la laisser s'enfuir.

   En toute inconscience, David bouscula la fatalité. […]

   Le voyage à La Havane d'Arielle en solitaire était suivi d'une autre  tradition. Chaque année, ils exportaient leur difficulté d'être à deux dans une capitale. […]Cette année-là, David choisit Paris qu'ils connaissaient mal. Arielle décoda un coup de pouce de l'évidence: elle devait me  téléphoner.

 

   Nous nous retrouvâmes dans un bar près de la salle de concert où je m'apprêtais à interpréter et diriger le deuxième concerto pour piano et orchestre de Chopin. […] L'endroit était bruyant, enfumé, inadapté pour l'importance de notre moment.

-          Pourquoi cette gargote? Questionnai-je.

-     Nous allons au concert ce soir avec des amis. J'ai prétexté une visite de courtoisie à un client pour pouvoir m'échapper et vous revoir.

-     A quel concert assistez-vous?

     Il existait une autre salle où un quatuor étranger se produisait mais elle l'ignorait. Elle sourit. Je l'entendis penser « il n'a pas changé»:

-   Où vivez-vous Pierre? Nous sommes dans un quartier où la principale animation est ce prestigieux auditorium. Il y a en ce moment des hommes d et des femmes qui se préparent pour nous offrir le meilleur d'un homme qui n'aurait pas dû mourir si tôt. Je parle de Chopin bien sûr.

-          « Si tout va bien, me disais-je, elle imagine que je ne connais même pas Chopin»

-          Donnez-moi un numéro de téléphone où il me sera possible de vous joindre demain, répondis-je en ignorant sa remarque.

    L'heure tournait, je n'avais plus le temps de m'attarder, les musiciens m'attendaient, je passais toujours un moment avec eux avant l'entrée en scène. […]

-  Quel est le numéro de votre siège? Lui demandai-je.

-  Pourquoi? Vous allez au concert?

-  Je connais la salle, je pourrai vous imaginer, tout simplement.

   Elle me montra son billet. Deuxième rang , sur la gauche. Elle verrait mes mains et mon profil droit. Elle me tendit une carte professionnelle et écrivit quelques chiffres. Je feignis d'être impressionné par le «Maître» inscrit devant son prénom. Elle était  avocate. Curieux cette rencontre entre une avocate réalisée et un avocat  « manqué ».

-   Vous n'êtes pas sérieux! Dit-elle un peu tristement. Quel homme êtes-vous? C'était stupide de ma part d'avoir voulu vous revoir.

     Je ma levai plus brusquement que je l'aurais souhaité:

-   Arielle, méfiez-vous de ceux qui ne rient jamais. Ce ne sont pas des gens sérieux.

-   Une formule ?

-  Non, une citation et c'est du Chopin.

   

   Je la quittai en lui embrassant la paume de la main

     Elle était déçue, la rencontre ne ressemblait pas à ce qu'elle avait espéré. Elle s'était trompée sur mon personnage , son imagination m'avait idéalisé devait-elle penser à ce moment-là. Elle aurait voulu revivre un peu Cuba, moi aussi, elle m'aurait souhaité plus chaleureux et j'étais ailleurs. Nous nous séparâmes poliment.

    Dans ma loge, je m'habillai avec soin. Je dirigeai pour la première fois depuis le clavier. […]  

    Le premier violon ouvrit ma porte:

-   Maître vous venez?

-   S'il vous plaît, pour une fois je souhaiterais être seul un moment. Pourriez-vous me trouver une rose blanche?

-  Une rose blanche? Où voulez-vous que j'aille la chercher?  Nous commençons dans moins de cinq minutes.

-          J'ai vu une grande plante à l'arrière scène, il me semblait qu'il y avait du blanc.       

-          Oui mais ce sont des chrysanthèmes, ceux de la pièce d'avant-hier. […] Bon , si je trouve une rose je vous l'apporte?

-          Non, vous la déposez sur le cinquième siège au deuxième rang en partant de la gauche.

-          Vous allez bien Maître?

-          Oui, ne vous inquiétez pas.[…]

Un murmure rassurant me parvenait depuis la salle, le public s'installait tranquillement. Arielle et David étaient accompagnés de deux couples. Lorsqu'elle s'approcha de son siège, elle eut la surprise d'y voir une fleur blanche.

-          Une attention de ton client? S'étonna David

-          Quel client?

-          Celui que tu as vu avant le concert.

 Elle avait oublié le prétexte de son rendez-vous

-          Ah oui! Probablement..

-          Original! En plus ton dossier doit être assez mal parti.

-          Pourquoi dis-tu cela?

-          Je ne suis pas superstitieux mais un chrysanthème quand même!

Arielle connaissait ce ton pincé, signe avant coureur du soupçon. […]

      Ce ne pouvait être que moi, j'étais donc dans la salle. Elle balaya le parterre du regard puis le balcon en sentant la vigilante attention de David. Elle avait confiance. J'ai pu déposer une fleur sur son siège, je saurai donc la retrouver. Mais un chysanthème… Devait-elle chercher un symbole?

       Les musiciens s'installaient. […]

  

     Les applaudissements devancèrent mon entrée en scène.[…] En applaudissant mollement, Arielle continuait de fouiller la salle de son regard oblique. Ce qui agaçait David. Qui cherchait-elle?

-          Le spectacle est devant toi, tu pourrais t'y intéresser!

Elle s'intéressa au moment où j'entrai en scène. Je m'avançai vers le public et m'inclinai:

-          Ce n'est pas possible! Qui est-ce? Demanda-t-elle à un David déconcerté

-          Mais…  le chef d'orchestre et ce soir le pianiste aussi. Arielle tu es dans une salle de concert avec ton mari. […]

 

     Je ne sus jamais qui, du chef d'orchestre ou du pianiste, la salle ovationna. Figée dans son fauteuil, Arielle n'applaudissait pas alors que David manifestait un enthousiasme qu'elle aurait sans doute souhaité plus modéré. Elle attendit l'entracte pour se faufiler  dans les coulisses. Elle se heurta au service de sécurité qui lui refusa l'accès aux loges:

-          Le maestro ne veut  voir personne.

-          Si. Moi !

Son assurance fit vaciller la vigilance d'un agent, probablement plus perspicace que les autres. Elle entra dans ma loge sans frapper:

-          Je suis ridicule n'est-ce pas? […]

-          Merci d'être là, je vous attendais.

-          J'aurais pu ne pas venir.

-          Arielle, approchez-vous et asseyez-vous

[…]

-          Arielle, nous marchons comme nous pouvons sur les chemins que la vie nous fait prendre. A chacun son véhicule, le mien est la musique. […]

-          … La musique est un moyen de communication universel, elle se décline à l'infini, son langage est juste, elle est le lien entre les autres et soi-même.

    Dans son regard je surpris un étonnement désappointé:

-          Pourquoi me dire tout cela?

-          Parce que c'est le pilier de ma vie. Je voulais que vous le sachiez .

-          Je l'avais compris en vous écoutant. […]

…Elle se leva précipitamment, se plaqua contre moi et me serra si fort que nous perdîmes l'équilibre. Etait-ce un présage? Est-ce  nos vie qui basculaient ainsi?»

 

Les dés sont jetés, mais comment cette passion réciproque va-t-elle évoluer au gré du destin dont la maîtrise leur échappe? "That is the question! "

 

    Mais ce roman  nous réserve bien d'autres surprises. Christine Baron sait entretenir  notre curiosité au sujet des autres personnages qui focalisent l'attention de ce chef d'orchestre dévoué corps et âme à l'épanouissement de ses musiciens: Charlotte, Martin, Frédéric, Pietro à qui il voue une admiration et une amitié sans faille …

 

    Qui plus est, L'ÉCHO de la note BLEUE  nous est apparu comme un  roman  qui  renferme tous les éléments pour susciter l'intérêt de réalisateurs, metteurs en scène et producteurs pour  être porté à l'écran..

 

Victor Bérenguier - Volonne 11 janvier 2015




BIOGRAPHIE
Christine Baron

BIOGRAPHIE

Christine Baron a fait des études de lettres
  • * 17 ans en Afrique Noire Côte d’ivoire et Sénégal occupant différents postes dans le domaine économique liés aux entreprises françaises installées en Afrique.
  • * Collaboration avec le correspondant du Monde à Dakar, et journaliste pour le journal local sénégalais (reportages, interviews….)
  • * De retour en France : Activités dans l’événementiel – congrès scientifiques et médicaux - de la région de Nice.
  • * Etudes musicales et passion du piano.


BIBLIOGRAPHIE

* LE SOLEIL FOUDROYE  - Editions OVADIA – Collection Au Pays Rêvé - 2012

 

Témoignage du Professeur Maurice SCHNEIDER : Président de la Ligue Départementale contre le Cancer :

 

« Cet ouvrage est très touchant. Il nous montre que lorsqu’une personne est atteinte, la famille, les proches sont également atteints.  

C’est ce qui fait la rareté de ce livre. Nous avons l’habitude de lire des témoignages d’anciens malades. Christine nous fait découvrir la douleur d’un proche. Elle décrit la souffrance avec une grande sensibilité et avec un remarquable talent d’écrivain.

Il faut lire ce livre à la fois plein de tristesse mais aussi d’espoir et qui nous stimule, nous les soignants, à nous battre pour guérir. »

 

 

* DIVISER POUR MIEUX GROUPER  Editions Ovadia 2013 :

 

Critique Ratatosk – 19 Novembre 2013 - Libraire

« Ce livre de Christine Baron fut une excellente surprise mais je dois dire que cette auteur (non je ne mets pas le "e") m'a depuis le début habitué à cela. J'adore ce qu'elle écrit et pourtant elle n'opère pas du tout dans mes genres favoris.

Avec "Diviser pour mieux Grouper", madame Baron vous plonge au cœur de la reprise d'une structure publique "La Pinta" qui tombe désormais dans l'escarcelle d'un groupe : "Le Groupe". Bien entendu, de fait, la logique de fonctionnement change.                                                                                                                                                

Au travers de son héros, un des responsables, vous découvrirez alors l'ambiance qui plombe cette passation de relais. Vous serez confrontez aux tensions qui frappent les employés. Mais attention, le panier de crabe n'est pas toujours là où on s'attend à le trouver et ces crustacés prennent bien des apparences. D'ailleurs, ne vous attendez pas non plus à vous ennuyer car, comme à son habitude, madame Baron adresse des sujets graves et difficiles avec une légèreté de ton et une dérision qui vous mène vers le sourire.

Vous vibrerez pour les employés de "La Pinta" mais vous sourirez sans doute des incongruités que vous découvrirez au fil des pages. Bien des situations décrites dans ce roman confinent à l'absurde mais, comme le dit l'auteur elle-même : "ça ne s'invente pas". Et oui, ce livre est inspiré de faits réels et d'une situation qui a bien eu lieu. »

Légende photos: L’ÉCHO DE LA NOTE BLEUE

                 

                Auteur:   Christine BARON

         Éditions: Au Pays Rêvé

         Format : 205 x 140. 287 pages. Prix: 20 €

Photos repro. V.B.)

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