COUP DE CŒUR DE ROLAND BERENGUIER
Coup de coeur ROLAND BERENGUIER

OCTOBRE 2024

Coup de cœur N° 147

Une pizza, un champion

Avant de parler du champion de pizza, rappelons les origines et l'essor de la pizza :

La pizza est devenue une véritable tradition alimentaire dans le monde. Ce plat populaire a été inscrit au patrimoine immatériel de l'humanité de l’UNESCO le 7 décembre 2017, une consécration méritée.

L'UNESCO a donc reconnu l'art du pizzaiolo et le classe au rang de gardien de la tradition, c'est lui qui transmet technique et recette de la pâte. L'UNESCO reconnaît aussi l'apprenti pizzaiolo qui seconde le maître, puis vient le « fornaio » (l’enfourneur), celui qui façonne la pâte en disque et la fait cuire.   

Mondialement connu, ce plat populaire est né à Naples où il a fait son apparition à la fin des années 1700. La première pizzeria a également été créée à Naples en 1738: il s’agit du restaurant l’Antica Pizzeria Port’Alba qui est toujours en activité aujourd’hui !

Mais d’où vient ce terme « pizza » ?

Différentes étymologies sont avancées sur cette dénomination :

Le mot « pizza » pourrait ainsi venir du latin « pinsa » qui signifie « étaler » ou encore de l'allemand « bisso », un terme employé pour désigner un morceau de pain. En Grèce antique, on appelait aussi une sorte de galette plate la « pitta »... Il n'y pas de preuves sur la véritable origine du mot.

Au fil des périodes, la pizza a évolué. Celles que nous connaissons aujourd’hui est indissociable de Naples, et c'est dans cette ville que la simple « focaccia » s'est enrichie de basilic, de saindoux, de fromage et au 18ème siècle de tomates. Pendant longtemps, ce fut un plat mangé dans la rue, le plat préféré du peuple, et les restaurateurs ne se sont pas trompés, car il est aussi très rentable.

Toujours à Naples,  Gennaro Majello semble être le premier pizzaiolo (années 1790).

D'après Pierre Leclerc, historien à Liège, « c'est au cours du 19 e siècle, qu'une visite royale  consacrera la pizza Margherita, la plus célèbre de toutes les pizzas. On raconte qu’en 1889, lors de son passage à Naples, le roi Umberto (1844-1900) fait demander au pizzaiolo Raffaele Esposito de la pizzéria Brandi, de préparer une variété de pizzas pour la reine Margherita (1851-1926) qui séjourne au palais Capodimonte et est fatiguée de la cuisine française. Raffaele prépare alors une pizza au lard, au caciocavallo (fromage à pâte filée) et au basilic, une aux petits poissons et une à la tomate, mozzarella et basilic. C’est précisément cette dernière que la reine désigne comme sa préférée »

Toujours d'après Pierre Leclerc, « la mondialisation de la pizza ne s’est pas réalisée à partir du lieu d’origine, à savoir Naples, mais bien à partir des États-Unis. La pizza est introduite à New-York au tout début du 20e siècle avec l’immigration napolitaine. En très peu de temps, elle s’est imposée comme un symbole de la gastronomie de l’ensemble de la communauté italienne installée aux États-Unis, alors qu’en Italie, elle demeure confinée à Naples jusqu’aux années 1950.

À partir des années 1940, la pizza s’américanise complètement avec la Chicago-style pizza qui comprend beaucoup plus de garniture que sa sœur napolitaine. Et surtout, elle s’industrialise. Dans les années 1950, elle répond parfaitement aux attentes du public américain à la recherche de plats faciles à préparer et faciles à consommer dans un contexte où les deux membres du couple travaillent à l’extérieur et où on a de moins en moins de temps à consacrer au repas de midi. C’est ainsi que la pizza surgelée connaît un vif succès dès 1957 et que les chaînes de pizzérias franchisées s’imposent à partir de 1958, d’abord aux États-Unis, ensuite à l’échelle planétaire. »

 

En 2023, 1.19 milliards de pizzas ont été vendues en France, soit une augmentation des ventes en volume de 14.7% par rapport à 2021.

En moyenne, le consommateur français achète 10 kg de pizza par an, ce qui en fait le deuxième plus grand consommateur du monde (après les États-Unis). Les pizzas sont fortement ancrées dans les habitudes de consommation des Français.

Et au fait, ce champion de pizza ? Reprenons l'article paru dans le journal quotidien « Le Républicain » le 1er mars 2024 :

« « C'est à Monteton (Lot-et-Garonne), dans un petit atelier d’une dizaine de mètres carrés, que se trouve le meilleur pizzaïolo du monde ! Il s’appelle Jean-François Giroldi et il a remporté le championnat du monde en ce mois de février 2024 du prestigieux concours « Pizza sans Frontière ». Une récompense assez folle pour cet homme de 73 ans, qui s’est confronté aux meilleurs artisans de la planète à Rimini, en Italie, dans la catégorie phare : la « Pizza Classica » .

Rien ne prédestinait Jean-François à devenir champion du monde il y a encore quelques années. « J’étais réalisateur de films. J’avais une petite boîte de production et je tournais des spots publicitaires, des films pour la France et du contenu pour la télévision en Afrique. »

Dans le même temps, il était déjà un passionné de cuisine, grâce à sa maman qui était elle-même une excellente cuisinière. « Je suis derrière les fourneaux depuis tout petit. À la retraite, nous sommes revenus ici, au Moulin du Dropt. Mais je m’ennuyais » révèle-t-il.

Il décide de construire un four à bois et commence à faire des pizzas. Mais évidemment, ses premières productions sont décevantes. 

C’est là-bas que le Niçois de naissance se rend compte que « je ne savais absolument pas faire une pizza ». « J’ai appris que l’empâtement et la fermentation de la pâte étaient les choses les plus difficiles à réaliser. »

À l'Institut Mondial de la Pizza, sous les ordres de Thierry Graffagnino, il découvre donc les bases. À son retour, le Franco-Italien remarque qu’il a drôlement progressé. Il fait goûter ses nouvelles pizzas à ses amis. « Elles sont géniales ! Vends tes pizzas », lui rétorquent-ils.

Ni une ni deux, il lance sa pizzeria, suit une formation d’hygiène, et l’aventure débute.

Au départ, pour ne pas choquer ses premiers clients, le passionné de cuisine italienne confectionne des pizzas classiques. Puis très vite, il commence à réaliser des recettes différentes « avec des bases plus travaillées comme la crème d’aubergine, la crème de champignon, etc ».

Grâce au bouche-à-oreille, sa pizzeria commence à être connue. Grâce à sa victoire lors des championnats du monde, elle le sera d’autant plus.

Pour le concours, il décide de créer la pizza Monteton. Le but était de mélanger les produits italiens avec les produits locaux.

La fameuse pizza Monteton :

  • Crème gorgonzola comme base ;
  • Champignons frais ;
  • Pancetta al Pepe Nero (charcuterie italienne) ;
  • Romarin (local) ;
  • Après cuisson, pruneaux (locaux) ;
  • Éclats de tuiles de Parmesan ;
  • Noisettes torréfiées concassées (locales) ;
  • Poivre de Sichuan ;
  • Chutney de pruneaux (fait maison).

Pourtant, le Montenais a bien failli ne jamais participer a ce concours. C'est sur insistance de copains qu'il participe à ce concours à Rimini.

Avec seulement dix minutes pour concevoir sa pizza lors du championnat, Jean-François s’entraîne sérieusement. « J’ai sans doute fait une soixantaine de pizzas avant d’avoir le résultat escompté. » En revanche, la pression était bien présente. « Jusqu’au moment où l’on m’a appelé pour aller la faire, le stress était énorme. Je ne voulais pas me louper. Quand je commence ma pizza à Rimini, les gens voient toutes les pointures et un illustre inconnu au milieu. C’était moi. »

Sur plus de 400 participants, c’est finalement l’ancien réalisateur de films qui devient champion du monde. 

« Lorsqu’on m’appelle, je n’en reviens pas. Je dis d’ailleurs aux autres que ce n’est pas possible », sourit-il. Depuis, Jean-François a réalisé. « Le jury m’a dit qu’ils avaient adoré l’originalité du concept. Que la pâte était incroyable… » C’est d’ailleurs avec un large écart de points par rapport au second que le Lot-et-Garonnais l’a finalement emporté.

L’an prochain, le champion remettra sa coupe en jeu, dans une autre catégorie. 

« Mon fils est barman. Nous allons participer ensemble à la catégorie pizza cocktail. Cela va être chouette. » En parlant de famille, l’artisan ne manque pas de remercier sa femme, Estelle Giroldi. Bien plus qu’une assistante. « Elle est la co-gagnante de cette coupe. »

Désormais, le champion est de retour au Moulin du Dropt. Ouvert habituellement le samedi, il ouvrira désormais le vendredi toute l’année face aux demandes qui affluent. Sans oublier les cours particuliers qu’il donne à qui le souhaite. Parce que la transmission est la valeur d’un vrai champion. » »



Roland Bérenguier     
Octobre 2024     

 




Réalisation Alain Escobar